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Spécial Stanley Kubrick !

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Message par Alouqua Dim 27 Mar - 14:44

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Stanley Kubrick : Une vie pour le cinéma

A l'occasion de l'incroyable exposition-rétrospective Stanley Kubrick à la Cinémathèque Française (du 23 mars au 31 juillet 2011), retour sur la carrière d'un cinéaste à part et, pour beaucoup, de génie.

UN CINÉASTE À PART

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Il n'aura fallu que quelques films à Stanley Kubrick pour mettre le Septième Art à ses pieds, la plupart de ses travaux étant qualifiés de chefs-d'oeuvre, tant dans le fond que dans la forme. Parfois vu comme un provocateur controversé, il s'était fait l'expert de l'exploration de l'âme humaine, sachant dévoiler subtilement le côté obscur de chaque être.

Kubrick est né à New York le 26 Juillet 1928. Durant son enfance, son père désespérait de voir son fils ne trouver d'intérêt en rien. Après l'avoir fait jouer aux échecs, il lui offre alors un appareil photo pour ses treize ans. C'est peut-être l'un des moments les plus décisifs de sa vie puisque Stanley Kubrick se passionnera pour cet art. Il parcourra New York de long en large pour photographier la ville, développant lui-même ses photos jusqu'au jour où il est publié par Look Magazine qui l'engage comme apprenti photographe à 17 ans. Mais c'est peu à peu vers le cinéma qu'il va se tourner. En 1950, toutes ses économies passent ainsi dans son premier documentaire, Day of The Fight.

C'est le début de sa carrière de cinéaste. Son premier vrai film Fear And Desire réalisé en 1953 lui met le pied à l'étrier, même s'il refusera toujours de le montrer au grand public, le considérant comme un essai sans suite. Remarqué, il réalise ensuite Le Baiser Du Tueur et l'Ultime Razzia jusqu'à son premier grand succès, Les Sentiers De La Gloire, avec Kirk Douglas.

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LES SENTIERS DE LA GLOIRE (1957)

Pour beaucoup considéré comme le premier chef-d'oeuvre dans la carrière de Stanley Kubrick, Les Sentiers de la gloire est certainement l'exemple parfait de l'anti-film héroïque, plaidoyer désespéré contre le système même de guerre.

1916. La Grande guerre s'enlise dans les tranchées. Afin de gagner une nouvelle étoile, un général français ordonne une attaque absurde contre une position allemande imprenable. L'assaut, quasi suicidaire, est lancé. Les soldats sont décimés et les quelques survivants battent en retraite pour fuir le massacre. Le général furieux entreprend de faire condamner trois hommes par un conseil de guerre pour "lâcheté devant l'ennemi".
Au terme d'un simulacre de procès, ils seront exécutés "pour l'exemple" devant leur régiment.

Kubrick fustige l'armée et décrit les rouages absurdes mais inéluctables de la hiérarchie martiale. Tourné en Allemagne, le film impressionne par sa reconstitution des tranchées et la performance magistrale livrée par Kirk Douglas en colonel révolté contre le cynisme et la manipulation des masses. À l'époque, on reprocha à la charge politique son pessimisme et son antipatriotisme. Jugé trop critique envers l'armée, le film ne fut même pas montré en France avant 1975. Aujourd'hui, Les Sentiers de la gloire est devenu un modèle cinématographique incontestable, qui a su dépeindre l'un des plus grands drames de la condition humaine.

Suivra très vite Spartacus, dont il obtiendra la direction grâce, justement, à l'acteur. Tout lui sourit professionnellement, pourtant, c'est la rupture. Déçu par Hollywood, il décide alors de s'installer définitivement en Angleterre avec sa troisième épouse (rencontrée sur le tournage des Sentiers de la gloire).

C'est alors que va sortir, en 1962, son premier vrai scandale : le sulfureux Lolita.

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LOLITA (1962)

Lolita conte la dérangeante histoire d'un professeur de lettres divorcé et charmeur, Humbert Humbert, tombant obsessionnellement amoureux de la très jeune fille de sa logeuse, Lolita. Après s'être commodément débarrassé de la gênante mère, le couple immoral se lancera dans une course à travers les Etats-Unis.

Ecrit en collaboration avec l'écrivain du roman, Vladimir Nabokov (même si ce dernier se déclarera déçu du résultat), le film de Kubrick est une mini bombe dans une Amérique soit-disant bien pensante, étrillée par la critique sociale que le réalisateur propose. Car, à travers cette relation contre-nature, tordue et malsaine (même si rien n'est jamais clairement montré à l'écran), c'est véritablement une dénonciation des moeurs américaines qui se déroule sur grand écran grâce, notamment, à une sublimation de l'érotisme commun faussement innocent (ah le générique de début !) puis à une inversion des rôles à la fin du film prouvant clairement la mort de l'innocence.

Le ton est donné, Kubrick ne se cherche pas d'amis. Il le prouvera d'ailleurs l'année suivante avec son génial Docteur Folamour..

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DOCTEUR FOLAMOUR (1963)

Toujours avec Peter Sellers (qui incarne d'ailleurs les trois personnages clés du film), Docteur Folamour - cyniquement sous-titré « ou comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer la bombe » - dénonce, avec un humour macabre décapant, une situation géopolitique mondiale gangrenée par le narcissisme patriotique et la paranoïa généralisée autour de l'arme nucléaire.

Stanley Kubrick n'y va pas avec le dos de la cuillère et raconte avec une bonne dose d'absurde - glaçant - la crise de paranoïa d'un certain général américain Jack D. Ripper (littéralement Jack L'éventreur) qui décide de lancer une attaque atomique contre l'URSS. Malheureusement, le système de l'alerte nucléaire est si sophistiqué qu'il est impossible d'arrêter le vol des bombardiers. Dès lors, le monde est plongé dans un véritable cauchemar !

Le film est une charge au mortier contre une géopolitique qui marche sur la tête : du gouvernement américain basant sa politique de guerre sur les conseils d'un scientifique nazi au président russe trop ivre pour comprendre la gravité de la situation, tout le monde en prend sérieusement pour son grade.

Tout simplement génial.

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2001, L'ODYSSÉE DE L'ESPACE (1968)

Le succès connu par ce dernier film permet à Kubrick d'enfin faire absolument ce qu'il veut .

Ainsi en 1968, Kubrick (en collaboration avec l'écrivain Arthur C. Clarke) présente au monde son étrange 2001, L'Odyssée De L'Espace, un film instantanément culte - qu'on aime ou qu'on déteste, considéré comme la naissance du film de science-fiction moderne... et qui en inspire encore plus d'un aujourd'hui.

Cette magistrale interrogation métaphysique sur l'Homme et le progrès en perdra plus d'un en cours de route (Woody Allen dit même qu'il n'y avait pas compris grand-chose la première fois), pourtant cette « réaliste » vision prophétique (et pessimiste) de la société humaine à travers trois âges virtuels fera de 2001 un film intemporel qui renouvellera totalement le genre de la Science Fiction... et le cinéma en général.

Jamais, en effet, on n'était allé aussi loin dans l'abstraction scénaristique d'une part, et la précision technologique d'autre part.

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ORANGE MÉCANIQUE (1971)

En 1971, vient le temps de sa plus grosse provocation, un autre culte instantané, une apologie du sexe et de la violence.

Ainsi le dérangeant Orange Mécanique - tiré du roman homonyme de Burgess - suit le terrifiant Alex (incroyable Malcolm McDowell) et dépeint un futur contre-utopique peuplé de gangs de jeunes dénués de limites morales ou sociales.

Porté par l'esthétique pop décomplexée des sixties (sans compter l'excellent travail sur la bande son), le film déroule une violence psychologique terrible, basée sur la mortelle inquiétude engendrée par la folie des faits accomplis par le gang d'Alex et par le sentiment d'insécurité profonde qui en découle.
Subversif en diable, Kubrick placarde la société de l'époque, pointant sans pitié des moeurs et aspects politiques dérangeants.

Avec sa structure cyclique (refaisant vivre les mêmes crimes au bourreau devenu victime) le film provoque à la fois excitation et malaise... tout en balançant une droite à la morale.
Faisant hurler la censure, Orange Mécanique sera retiré des écrans britanniques... avant que Kubrick, blessé, ne décide de l'ôter complètement des salles obscures, suite à une série de crimes « inspirés » du film puis de menaces contre sa personne.

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BARRY LYNDON (1975)

Kubrick se plonge ensuite dans le projet fou de tourner une grande épopée sur Napoléon. Méticuleux, il passe des années à récolter informations, documents et objets retraçant l'incroyable ascension du caporal Corse.
Malheureusement, à « trop » préparer son film, il se fait doubler et les spectateurs découvrent en 1970 Waterloo de Sergei Bondarchuk avec Rod Steiger.

Déçu, Kubrick va alors se lancer dans une sublime fresque irlandaise : Barry Lyndon. Tourné en 300 jours (!) à partir du roman (encore une fois) de William Thackeray, le film est une merveille esthétique qui sera d'ailleurs récompensée de quatre Oscars techniques.

Véritable rendu d'un temps et d'un style où l'élégance régnait, Barry Lyndon fourmille d'audace et d'innovations, et offre un éblouissement visuel permanent. Tourné en lumière naturelle ou à la bougie (grâce à une technologie inédite piquée à la NASA), c'est une balade onirique et drôle (oui, oui) dans l'art pictural du 18ème siècle.

La composition des plans, comme les mouvements de caméra et les utilisations du zoom... tout y transpire la perfection. Et comment oublier la scène du baiser sur la terrasse entre Ryan O'Neal et Marisa Berenson ?

Résultat ? Un bide commercial, mais un film mythique.

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SHINING (1980)

Fâché avec le public Kubrick ? Pas si sûr... et c'est avec une adaptation (encore une) du Shining de Stephen King qu'il va à nouveau exploser et offrir, par la même occasion, l'un de ses plus grands rôles à Jack Nicholson.

Loin des sentiers horrifiques balisés par le cinéma commercial, cette histoire d'hôtel hanté, truffée d'étrangetés et de répétitions oppressantes impose - avec une simplicité apparente - une terreur psychologique rare.

L'énorme et inédit soin apporté à une image (et une imagerie !), servie par le tout nouveau système de Steadycam, crée une atmosphère comme on a rarement ressenti dans une salle obscure.
C'est alors que les drames les plus quotidiens (les violences conjugales perpétrées par le personnage de Jack) prennent des proportions aussi effrayantes, voire plus effrayantes, que les fantômes et autres entités qui hantent les couloirs de l'hôtel.

Sans compter, en plus, les performances surréalistes de Jack Nicholson et de Danny Lloyd face à des Shelley Duvall et Scatman Crothers médusés...

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FULL METAL JACKET (1987)

Kubrick, toujours exilé à Londres, prend de plus en plus son temps entre deux films et le public doit attendre 7 ans avant de découvrir Full Metal Jacket, une sorte de version noire et cynique de l'humaniste Platoon sorti l'année précédente.

Selon ses proches, le cinéaste aurait toujours voulu faire un film stylisé sur la guerre. A dire vrai, des films guerriers, Kubrick en a déjà fait. Et des très bons. Pourtant, Full Metal Jacket (adapté d'une nouvelle de Gustav Hasford) se démarque clairement des Sentiers de la gloire ou encore de Docteur Folamour.

Porté par de jeunes acteurs (qui exploseront peu de temps après), le film s'organise en deux parties : la terrifiante - et tragique - formation des jeunes recrues, pendant laquelle on regarde, effarés, leurs barrières psychologiques tomber une à une ; puis le meurtrier front vietnamien, où l'on retrouve nos jeunes hommes... devenus des bébé tueurs. Glacial.

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EYES WIDE SHUT (1998)

Après cela, Kubrick se lancera à nouveau dans la préparation d'un film monumental qui, malheureusement, n'aboutira jamais. Un projet lui tient en effet à coeur depuis des années : réaliser une oeuvre sur la Shoah. Des années de préparation, une tête de casting choisie (Joseph Mazzello, le petit Tim dans Jurassic Park). Mais cette fois, c'est un de ses amis qui lui coupera l'herbe sous le pied. En 1994, Steven Spielberg sort sa Liste de Schindler et, après cela, Kubrick ne verra plus d'intérêt à se pencher à son tour sur cette période de l'Histoire.
Il entame alors la préparation d'un nouveau film de Science Fiction : AI, Intelligence Artificielle. Film qu'il confiera pourtant par la suite à Spielberg, tout en restant - de loin - attaché au projet.

Après toutes ces déconvenues, le cinéaste se retourne vers un film plus intimiste : Eyes Wide Shut. Réunissant un vrai couple de stars sur grand écran (Tom Cruise et Nicole Kidman, même si, selon la légende, Bruce Willis et Demi Moore auraient été approchés), le film dégage un vrai/faux parfum de scandale. Pornographique pour certains, vaguement sulfureux pour d'autres, Eyes Wide Shut explore sombrement des thèmes comme le fantasme, la jalousie et l'obsession sexuelle. Le long-métrage, malgré son exploration des divagations de l'esprit et des mécanismes de manipulation et de torture mentale, est étrillé par une critique qui ne reconnaît plus la patte du cinéaste.

Si le film n'est certainement pas le meilleur du réalisateur, on ne peut nier un vrai travail sur la photo et la mise en lumière (toujours) ainsi que sur la bande son. Pour une dernière oeuvre, cela n'a peut-être pas suffi.

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STANLEY KUBRICK - A LIFE IN PICTURES (2001)

Narré par Tom Cruise, ce documentaire sur la vie de Stanley Kubrick sorti en salles en 2001 (soit deux ans après la mort du cinéaste) se propose comme le document audiovisuel indispensable à tout cinéphile.

Si le début du film suit le schéma de la biographie filmée (avec documents familiaux et d'archives), la suite reprend largement tous les différents reportages et interviews réalisés à travers les ans, et tous regroupés dans les différents DVD et coffrets.

Ce n'est certes pas pour autant que l?on boudera notre plaisir à les redécouvrir.

Le plus ?

La liste INCROYABLE d'intervenants.

En vrac : Steven Spielberg, Jack Nicholson, Sydney Pollack, Jan Harlan, George Lucas, Woody Allen, Martin Scorsese, Friedkin, Hudson, et ainsi de suite.
Ajoutez à cela une myriade de techniciens, auteurs, spécialistes et acteurs... et, bien entendu, sa famille.

Dossier réalisé par Eléonore Guerra pour "Comme au cinéma"


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